Nous, économistes, soutenons Hollande

Voici ce que l’on pouvait lire le 17 avril sur LeMonde.fr, avec nos commentaires, évidement.

Nous sommes économistes et suivons avec attention les débats en cours et les annonces faites par les candidats à la présidence. Nous jugeons leur ambition économique à la pertinence des options qu’ils proposent, en particulier pour ce qui concerne la reprise de la croissance et de l’emploi, le redressement de notre compétitivité, la régulation financière et la vision des politiques économiques européennes. Mais nous jugeons aussi de la crédibilité de leur projet, notamment la cohérence d’ensemble des propositions, leur impact sur la cohésion sociale de notre pays, la constance et la fiabilité des engagements et leur compatibilité avec les contraintes budgétaires. Un candidat se dégage à nos yeux, le plus apte à redresser la France et rassembler les Français. Ce candidat, c’est François Hollande.

En effet, l’heure est aux choix. La crise de la zone euro montre que le pire reste possible : une course absurde vers le moins-disant social, des politiques d’austérité qui brisent la croissance, et finalement la tentation du chacun pour soi qui devient la plus forte. Il faut mettre un terme à ces politiques qui dévastent les économies européennes. La crise de la dette ne pourra se régler si la croissance est brisée et le pouvoir d’achat en berne. Une réorientation de la construction européenne est urgente, au service de la croissance et des citoyens européens, avec notamment la négociation d’un nouveau Pacte de responsabilité, de croissance et de gouvernance avec nos partenaires européens.

La croissance des dettes publiques rend indispensable l’assainissement des finances publiques (Le programme présidentiel du Parti Socialiste ne va pas dans le sens de l’assainissement des finances publiques, coûtant plus que ce qu’il va rapporter à l’état). L’objectif de revenir à l’équilibre budgétaire à la fin du quinquennat constitue un cadre exigeant mais crédible (Il n’y a rien de crédible dans le programme de François Hollande d’émettre l’hypothèse de départ d’une croissance à 2% et de 6,5 millions de chômeurs alors que nous sommes véritablement plus proche de 0% de croissance et de 10 millions de chômeurs). La grande réforme fiscale annoncée par François Hollande devra certes être précisée et son calendrier accéléré. Mais le cap fixé est le bon, avec une réorientation de la politique fiscale dans le sens d’une plus grande justice sociale et d’une plus grande efficacité économique (Prenons un exemple: en quoi inciter à l’épargne, en augmentant la rémunération du Livret A et en en créant d’autres entraînerait une efficacité économique accrue alors que cela rongerai la consommation ?). Il faut mettre un terme à la sous-taxation du capital et des rentes, qui conduit non seulement à l’aggravation des inégalités, mais aussi aux excès spéculatifs à l’origine de la crise financière. (Qui a démontré cela ? Moins le capital est taxé, plus il circule, et plus il est utilisé, en moyenne, pour l’établissement de nouveaux projets, créateurs d’emplois et de richesse repartie ensuite sur les employés et les investisseurs qui ont prit des risques. De là à dire que le capital en lui même est à l’origine des excès spéculatifs, c’est fort de café: le marché, peut être, le comportement de certains, ok, mais le capital en lui même, ce n’est tout de même pas son utilité première).

L’efficacité et la justice se rejoignent donc pour rendre nécessaire une remise en cause des avantages fiscaux inefficaces, plutôt qu’une augmentation des impôts des ménages les plus fragilisés ; par la sélection, voire la sanctuarisation des dépenses d’investissement indispensables à la croissance à moyen terme, en particulier l’éducation et la recherche. (Sanctuariser une dépense… cela va à l’encontre du troisième paragraphe sur « l’assainissement des finances publiques ». Pas très cohérent…)

En fixant une norme d’évolution des dépenses publiques strictement inférieure à celle du PIB, François Hollande montre qu’il veut un Etat efficace et soucieux des deniers publics. Mais il tourne le dos aussi à la politique menée depuis 2007 qui réduit la modernisation de l’Etat à une simple équation comptable : le non-renouvellement d’un fonctionnaire sur deux (La modernisation de l’état ne se résume pas uniquement à ce propos réducteur, simpliste et démagogique. Cela passe par les NTIC de plus en plus présent dans le service public, en interne autant que pour les administrés: 75% des documents de douane dématérialisés, déposer une préplainte en ligne, carte d’identité biométrique etc… la liste est très longue. Cela passe aussi par d’autre types de simplifications administratives qui se sont réalisés lors que quinquennat de Nicolas Sarkozy). Cinq ans plus tard, nos administrations sont désorganisées, nos fonctionnaires démobilisés et la qualité des services publics dégradée… (Il ne faut pas faire croire aux gens qu’un surplus de fonctionnaires est nécessaire au bon fonctionnement des services publiques. Ce n’est pas la quantité qui compte, mais la qualité, autant dans l’éducation nationale que dans les ministères… mais dès que l’on parle de qualité, les foudres de la bien-pensance s’agitent) Il est temps de mettre un terme à des pratiques budgétaires qui n’ont de cesse d’entamer la légitimité de l’action publique. Restaurer notre crédibilité financière, ce n’est pas simplement jouer sur des paramètres financiers, c’est redonner à l’Etat le sens de sa mission et de ses responsabilités. (Il y’a des missions de service public à mener par l’État, nécessairement et indubitablement. Mais il faut admettre que d’autres missions de service publique peuvent et doivent être menées par des entreprises privées, au fonctionnement plus optimal et réactif que l’État.)

En matière d’emploi et de pouvoir d’achat une nouvelle orientation est nécessaire. La France dispose d’un atout exceptionnel, celui d’une jeunesse nombreuse et dynamique. Mais celle-ci connaît un taux de chômage inacceptable (Économistes ou Propagandistes ? Que des économistes nient le rôle prépondérant de la crise sur le taux d’emploi, des jeunes comme des moins jeunes, est tout de même ahurissant. Pour s’en faire une idée, regardons autour de nous, ou dans l’histoire économique: toute crise d’ampleur à entraîné une forte hausse du chômage. Cela sera-t-il différent avec François Hollande ? Bien sûr que non !). L’accent doit donc être mis sur les mesures en faveur de l’insertion professionnelle des jeunes, à travers la sécurisation des parcours professionnels, la réorientation des efforts de formation professionnelle, le développement de contrats ciblés – tels que les contrats de génération – et le renforcement de l’éducation nationale. Redonner leur place aux syndicats – en organisant une Conférence nationale pour la croissance et l’emploi – est également crucial pour que les salariés contribuent à la transformation du monde professionnel sans être cantonnés à la seule critique de décisions déjà prises par l’employeur (Renforcer des syndicats à l’allemande, oui. Des syndicats grévistes bridant le fonctionnement des entreprises à la française, non. Ces deux mentalités, que tout oppose à part leur statut de syndicaliste, sont significatives du fonctionnement sous-optimal des syndicats français. Avant de donner de la force à un système sous-optimal, mieux vaut le changer en profondeur. Faire l’inverse risque de donner un pouvoir accru à des forces limitant la croissance ou le fonctionnement d’entreprises publiques ou privées: des forces contraires). Comment faire évoluer sinon la mixité sociale, l’égalité hommes-femmes, les mobilités interentreprises et les stratégies d’embauche et de promotion dans les entreprises et les administrations ? (Question fourbe et manipulatrice: comme si la droite, en général, ne militait pas pour « la mixité sociale, l’égalité hommes-femmes, les mobilités interentreprises et les stratégies d’embauche et de promotion dans les entreprises et les administrations » ? A oui c’est vrai, la droite ajoute un critère lié à la performance, à la qualité. C’est pourtant le bon sens qui veut cela, mais la bien-pensance démagogique qui le rejette encore)

La mondialisation a été porteuse de croissance et de diffusion des connaissances mais a aussi engendré un monde plus fragmenté et, paradoxalement, moins solidaire, augmentant les inégalités de salaires et favorisant les délocalisations. La finance internationale n’a pas joué son rôle de catalyseur de la croissance et a fait revenir le capitalisme à ses pires travers (Etes vous économistes ou simplement révolutionnaires ? Aveugles ou les yeux ouverts sur le monde ? Sur les fonctionnements des marchés financiers apporteurs de capitaux permettant d’élaborer des projets créateurs d’emplois, de valeur et de richesse ? Comment pouvez vous dire que le marché financier n’a pas catalysé au moins une partie de la croissance de ces 60 dernières années ? Mis à part quelques crises, comme dans tout système, comment créditer un tel propos ? On ne va pas apprendre à personne que l’apport des marchés en capital, cette source d’investisseurs internationaux, à permis de créer des milliers d’emplois et de réaliser de nombreux projets. Vous le savez, mais à des fins démagogiques, manipulatoires et politiques, vous choisissez de le nier, de ne pas le croire. Pourtant vous détenez surement un PC Dell, un IPhone Apple ou un logiciel Micorsoft issus de ces levés successives de méchants capitaux sur des méchant marchés). Des mesures indispensables pour remédier à ces défaillances du système financier sont nécessaires. Ainsi, la séparation des activités bancaires entre spéculation et économie réelle permettra de circonscrire les risques, et donc de limiter les engagements futurs de la puissance publique en cas de crise bancaire.

L’interdiction d’utiliser les paradis fiscaux est également nécessaire, et permettra de réduire l’évasion fiscale, notamment si la mesure est étendue à l’ensemble des grands groupes français. Enfin, la mise en place d’une véritable taxe sur les transactions financières, l’interdiction des stock-options, le plafonnement des frais bancaires et l’encadrement du crédit à la consommation répondent au souci légitime de mieux protéger des dysfonctionnements de la finance. (Les transactions se déplaceront vers les pays qui ne taxeront pas. Les emplois aussi… donc vous créerez du chômage. Ceci dit, cette mesure, envisagée par James Tobin en 1972 à été contredite par lui même quelques années plus tard. Ensuite suggérée par Nicolas Sarkozy, elle est en attente de partenaires car ce dernier à conscience que cette taxe ne peut être appliquée que si une quantité assez importante d’états l’appliquent en même temps. Pour le reste, c’est l’objectif des deux candidats, et non pas exclusivement de François Hollande)

En matière de compétitivité, le bilan des cinq dernières années – 350 000 emplois industriels perdus, 900 usines fermées et un déficit commercial structurel – atteste d’une erreur stratégique dans l’analyse des déterminants de la compétitivité française, laquelle repose principalement sur la qualité de nos produits, de nos processus industriels et de notre gouvernance. Création d’une banque publique d’investissement dotée d’un réseau régional, incitations fiscales à la localisation des investissements en France, baisse de la cotisation foncière pour les entreprises qui innovent, instauration d’un crédit impôt innovation ciblé sur les entreprises effectivement concernées par la concurrence internationale… Ces mesures du candidat socialiste s’inscrivent dans la perspective qui convient pour relever le défi de l’innovation qui se pose aujourd’hui. (Lire cet article résume assez bien pourquoi cette création d’une banque publique d’investissement va à l’encontre de tout bien fondé économique.)

Le débat sur la politique économique à suivre ne doit pas occulter les questions économiques fondamentales qui se posent maintenant. Voulons-nous toujours plus d’objets de consommation, à l’obsolescence accélérée, consommateurs d’énergie et générateurs de déchets ? Ou bien plus de santé, plus d’éducation, plus de qualité de vie ? Réussir la transition écologique, c’est changer de mode de vie, créer une nouvelle civilisation urbaine fondée sur des activités de proximité, mettre fin à l’étalement urbain – catastrophe économique, écologique et sociale – et mettre en œuvre les investissements considérables qui seront nécessaires à la transition énergétique. (Partie quasi commune à Nicolas Sarkozy et à François Hollande)

Pour toutes ces raisons, nous appelons à voter pour François Hollande. Alors que le souvenir de 2007 nous oblige à la plus grande réserve sur les multiples promesses de campagne du candidat sortant, François Hollande a présenté un agenda de réformes qui dessinent à nos yeux la voie souhaitable. La crédibilité, l’ambition et la cohérence sont de son côté. (Il ne vous en faut pas beaucoup alors !)

Philippe Aghion (Harvard University), Michel Aglietta (Université Paris-X Nanterre), Yann Algan (Sciences Po Paris), Rémi Bazillier (Université d’Orléans), Maya Beauvallet (Telecom Paristech), François Bélorgey (Irest), Françoise Benhamou (Université Paris-XIII), Eric Brousseau (Université Paris-Dauphine, Institut Universitaire Européen), Julia Cagé (Harvard University), André Cartapanis (IEP Aix-en-Provence), Gilbert Cette (Université de la Méditerranée), Thomas Chalumeau (Sciences Po Paris), Mireille Chiroleu Assouline (Université Paris-I Panthéon Sorbonne), Daniel Cohen (Ecole Normale Supérieure Ulm), Elie Cohen (Sciences Po Paris), Brigitte Dormont (Université Paris-Dauphine), Bernard Gazier (Université Paris-I Panthéon Sorbonne), Jean Imbs (Ecole d’économie de Paris, PSE, CNRS), Marc Fleurbaey (Princeton University, Collège d’études mondiales), Samuel Fraiberger (New York University), André Gauron, Jérôme Gautié (Université Paris-I Panthéon Sorbonne), Patrice Geoffron (Paris-Dauphine), Tristan Klein, Jacques Le Cacheux (Université de Pau et des Pays de l’Adour), Jean-Hervé Lorenzi (Université Paris-Dauphine), Philippe Martin (Sciences Po Paris), Jacques Mistral (Harvard Kennedy School), El Mouhoub Mouhoud (Université Paris-Dauphine), Pierre-Alain Muet (Fondateur du Conseil d’analyse économique, député socialiste, et membre de l’équipe de campagne de François Hollande), Fabrice Murtin (Sciences Po Paris), Dominique Namur (Université Paris-XIII), Romain Perez (Université Paris-I Panthéon Sorbonne), Thomas Philippon (New York University), Thomas Piketty (PSE et EHESS), Michel Rainelli (Université Nice-Sophia-Antipolis), Lionel Ragot (Université d’Evry-Val-d’Essonne), Romain Rancière (PSE), Katheline Schubert (Université Paris-I Panthéon Sorbonne), Laurence Tubiana (Sciences Po Paris et Columbia University), Joëlle Toledano (Supélec), Dominique Villemot.

A tout ce beau monde, on est étonné de ne pas retrouver nos amis Dominique Plihon (Université Paris XIII) et d’autres camarades du CEPN (Centre d’économie de l’université de Paris Nord).

Nous vous invitons à lire aussi l’excellent article d’Olivier Berruyer.

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